Un nouveau regard sur l’efficience alimentaire des élevages

A l’heure où les filières d’élevage font l’objet de nombreux débats quant à leurs impacts, le Groupement d’Intérêt Scientifique (GIS) Élevages Demain présente sa nouvelle étude sur l’efficience nette des élevages pour nourrir les Hommes. Basée sur une méthode innovante d’évaluation de la contribution nette des élevages français à la production de denrées alimentaires, cette étude renouvelle la vision de la concurrence entre l’utilisation de la production végétale pour alimenter les animaux ou directement alimenter les Hommes.
Souvent critiqué pour sa faible efficience de conversion des ressources végétales en produits animaux, l’élevage témoigne d’une forte capacité à valoriser de nombreux coproduits végétaux, résidus de cultures et fourrages qui ne sont pas consommables par l’Homme. Alors qu’il est généralement avancé que 2,5 à 10 kg de protéines végétales sont nécessaires pour produire 1 kg de protéines animales, l’étude démontre ainsi, grâce à de nouveaux indicateurs, que de nombreux élevages ont une contribution positive à la production de protéines de qualité pour l’alimentation humaine.
Calcul de l’efficience alimentaire
L’efficience alimentaire est le rapport entre la quantité de produits animaux issus de l’élevage et les ressources végétales alimentaires utilisées pour les produire. Elle peut se calculer de deux manières.
La première consiste à prendre en compte tout ce que l’animal ingère et tout ce qu’il produit : c’est l’efficience brute.
La seconde consiste à ne considérer que la fraction des végétaux consommés par les animaux et qui est en fait directement consommable par l’Homme et seulement la fraction des produits animaux qui entrent dans la chaine alimentaire : c’est l’efficience nette. L’étude se focalise sur ce second mode de calcul.
Ces calculs peuvent être conduits pour différentes caractéristiques nutritionnelles des aliments, notamment pour les protéines, principal intérêt des produits animaux, et pour l’énergie.
Contribution des élevages à la production de protéines de qualité pour l’alimentation humaine
Le calcul de l’efficience nette met en évidence le rôle que joue l’élevage dans la valorisation des matières premières non consommables par les Hommes. Parmi celles-ci, l’herbe mais aussi les résidus de cultures et les coproduits de transformation des céréales, de protéagineux, d’oléagineux, de fruits, de légumes et de tubercules.
D’autre part, le calcul de l’efficience nette ne considère pas la part des produits animaux non consommée en alimentation humaine. Or il s’agit de coproduits aux usages multiples, et également utiles à la société (aliments pour les animaux de compagnie, oléochimie, pharmacie, tannerie/mégisserie, matériaux isolants à partir de la laine, fertilisants, etc.).
L’efficience nette est toujours beaucoup plus élevée que l’efficience brute montrant que, au-delà des différences par filières, la production animale est beaucoup moins en compétition avec l’alimentation humaine qu’il n’est souvent dit.
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Les monogastriques (porc conventionnel, poulet de chair standard, poule pondeuse) produisent entre 0,7 et 1,6 kg de protéines animales par kg de protéines végétales consommables par l’Homme et consommées par les animaux selon les modes d’alimentation et la composition des aliments achetés. Les élevages bovins laitiers produisent entre 0,6 à plus de 3 kg de protéines animales pour 1 kg de protéines végétales consommables par l’Homme et consommée par les vaches. Leur efficience est d’autant plus importante que la part d’herbe dans la ration s’accroît.
L’efficience nette de la production de viande de ruminant est, quant à elle, très variable. Si certains systèmes transhumants ne consomment aucune protéine consommable par l’Homme et ont donc une efficience qui tend vers plus l’infini, certains ateliers d’engraissement produisent à peine 0,2 kg de protéines animales consommables par kg de protéines végétales consommables.
Ce travail montre que de nombreux élevages peuvent avoir une contribution positive à la production de protéines de qualité pour l’alimentation humaine. Cette contribution est d’autant plus importante que l’élevage valorise davantage de ressources végétales non consommables par l’Homme telles que les herbages et les coproduits végétaux. L’amélioration de l’efficience nette des productions animales repose sur le choix des matières premières utilisées, l’amélioration de leur valeur alimentaire par des traitements appropriés et la sélection d’animaux aptes à bien les valoriser.
L’approche de l’efficience nette ne suffit pas, à elle seule à traduire la compétition pour l’accès à la production végétale entre alimentation animale et alimentation humaine. Il faudrait aussi intégrer la qualité nutritionnelle beaucoup plus élevée des protéines animales comparées aux protéines végétales et aussi prendre en compte l’occupation des surfaces, notamment celles qui peuvent être cultivées.
Source : GIS – Elevages Demain et CIV – Viande, Sciences et Société
À propos de GIS - Elevages Demain
Le Groupement d’Intérêt Scientifique (GIS) «Elevages Demain» est dédié aux systèmes de production animale à hautes performances économiques, environnementales et sociétales (ruminants, porcs et volailles). Il a pour objectif de promouvoir, au niveau national, des actions de recherche, de formation et de développement sur les systèmes de production animale intégrant la gestion durable de l’environnement et la viabilité économique des élevages. Seize partenaires de la recherche, du développement et des filières professionnelles se sont ainsi réunis pour mener à bien ce programme. Cette démarche s’inscrit dans la volonté de l’ensemble des acteurs des filières animales de répondre conjointement aux défis posés à l’élevage afin de proposer de nouveaux modèles productifs, économiquement viables, respectueux de l’environnement et socialement acceptables et équitables, en un mot: durables.
A propos du CIV – Viande, Sciences et Société
Le CIV – Viande, Sciences et Société est l’organisation référente en matière de connaissance et compréhension des éléments scientifiques qui étayent l’appréciation des impacts des filières élevage et viande. Il contribue aux débats dont ces dernières font l’objet en fournissant à des publics avertis une information fiable et de qualité permettant d’anticiper les évolutions et de se situer par rapport aux controverses sociétales existantes ou émergentes.