Fragilisée par plusieurs crises successives, la production française de Foie Gras a connu en 2022 un recul historique de 35 % sur un an. En 2023, la profession estime que la production de Foie Gras de canard et d’oie devrait reprendre +20 % par rapport à 2022. Le niveau de production restera cependant encore limité cette année, en raison de la résurgence du virus au printemps dernier, de l'absence de stocks début 2023, du manque de canetons, en cours de retour à la normale, et des mesures de prudence que les professionnels de la filière se sont imposées pour l’hiver. Sur les 10 dernières années, la production de foie gras a payé un lourd tribu à l’Influenza Aviaire en perdant 50% de ses volumes.
Retour sur une crise historique mondiale : toutes les espèces de volailles touchées et 35 pays européens concernés
Sur la saison 2021-2022, la filière française du Foie Gras a été victime, au même titre que les autres filières avicoles dans le monde, d’une épizootie d’influenza aviaire aussi violente qu’inattendue. Tous les types d’élevages et toutes les espèces ont été concernés. Aux USA, 58 millions de volailles ont été concernées, dont 44 millions de poules pondeuses.
La France a totalisé près de 1 400 foyers. L’épizootie a entraîné la disparition de 21 millions de volailles sur le territoire, dont 3,8 millions de canards dans la filière Foie Gras. S’ajoutent à cela 6 millions de canards qui n’ont pas été mis en place.
Aucun cas d’influenza aviaire en France depuis juillet
Le niveau de risque au regard de l’influenza aviaire est qualifié de « négligeable » sur l’ensemble du territoire métropolitain depuis le 7 juillet 2023. Une décision prise en raison du très faible nombre de foyers recensés en élevage depuis le mois de juin. La France a par ailleurs récupéré son statut « indemne » d’Influenza aviaire depuis le 14 août 2023 conformément aux dispositions de l’Organisation mondiale de la santé animale (OMSA).
Les mesures de prévention et de lutte renforcées depuis l’automne 2022 ont porté leurs fruits en limitant l’impact de l’épizootie en comparaison de la saison précédente. Depuis le 1er août 2022, la France a enregistré 402 foyers d’IAHP en élevage, soit trois fois moins que lors de la crise 2021-2022 où près de 1400 foyers en élevage avaient été recensés. Aucun nouveau foyer n'a été confirmé depuis le 11 juillet 2023.
En effet, après le sud-ouest lourdement touché dès l’automne 2021, le virus s’était propagé fin février 2022 pour la première fois aux Pays de la Loire, zone stratégique pour la filière. Si le bassin des Pays de la Loire produit 20 % du Foie Gras de France, il concentre en effet 100% de la génétique mondiale (reproducteurs) et plus de 70% des canetons destinés à la filière Foie Gras en France. Cette épizootie a ainsi été dramatique pour la filière puisqu’elle a entraîné la perte de 80 % de ses reproducteurs.
Après une trêve des foyers d’influenza aviaire en élevages à partir de la mi-mars 2023, la France a confirmé à partir du 4 mai la résurgence du virus au sein de plusieurs élevages du Sud-Ouest. Des mesures de gestion ont été immédiatement mises en place afin d’assainir les foyers révélés et d’éviter la diffusion du virus vers d’autres élevages. Depuis juillet, aucun nouveau cas n’a été constaté, ni en élevage, ni sur la faune sauvage.
Plan Vendée : un redémarrage volontairement prudent
Dans les Pays de la Loire, les professionnels des filières Palmipèdes (à foie gras et chair) avaient volontairement prévu un redémarrage prudent de la filière, basé sur une réflexion commune « le Plan Vendée », identifiant les communes les plus denses du territoire dans lesquelles le redémarrage a été retardé et très progressif. Il concerne une zone de 45 communes ainsi que des périmètres de 3 km autour des couvoirs ayant des activités d’exportation, des lignées pures de génétique ou des animaux destinés aux centres de sélection et de 1 km autour de 10 élevages de reproducteurs de la filière foie gras. Dans ces zones, les professionnels, grâce au soutien de l’État, ont retardé les mises en place de canetons au 15 mai 2023, et au 15 juin 2023 pour les activités d’engraissement.
Plan Adour : succès d’une expérience inédite
En concertation avec les acteurs de la filière volaille et les chambres d’agriculture, le CIFOG a proposé l’an passé une réduction drastique de la densité des élevages de palmipèdes dans 68 communes du Bassin de l’Adour dans le sud-ouest, zone systématiquement touchée par l’Influenza aviaire. Il s’agissait d’organiser un vide synchronisé des bâtiments d’élevage pendant la période la plus à risque soit entre le 15 décembre et le 15 janvier. Ce plan volontaire et inédit a été expérimenté dès cet hiver 2022/2023 et a porté ses fruits. Au 2 février 2023, seuls 20 foyers d’infection avaient été signalés sur la zone concernée, soit 95 % de moins qu’un an auparavant, au 2 février 2022.
Une capacité de production préservée
Les accouveurs des Pays de la Loire ont mené un important travail afin d’éviter la concentration des élevages des futurs reproducteurs, en s’attachant à les répartir différemment sur l’ensemble de la région. Cet important chantier va se poursuivre dans les années à venir, avec la création de nouvelles fermes de pontes.
Top départ de la vaccination en France
Depuis le 2 octobre, la filière peut s’appuyer sur des mesures de biosécurité strictes, ses plans de dé-densification volontaires et l’arrivée du vaccin pour reprendre progressivement ses marques. Sur 1 an, 64 millions de canards des filières canard à rôtir et à foie gras seront vaccinés dans tous les élevages de plus de 250 canards. Un déploiement dont le coût est estimé à plus de 100 millions d’euros, pris en charge à 85% par l’État, 15 % restant à la charge des professionnels. Cette charge supplémentaire et les mesures drastiques prises pour éviter la résurgence du virus ne laissent pas entrevoir de baisse des coûts de production dans les années à venir, malgré le fléchissement des coûts des aliments des canards.