Créer de la valeur en RHD, mode d'emploi...

Pour les aider à regagner des parts de marché sur le secteur de la Restauration hors domicile (RHD) particulièrement envahi par les produits d’importation, les filières poulet et dinde françaises ont lancé une étude afin d’identifier la marche à suivre et les leviers d’action possibles. Créer du renouveau, adopter une approche différenciée, segmenter l’offre produits font partie des réponses."L'innovation ne concerne pas uniquement le pôle Recherche & Développement, elle doit être cultivée en décloisonnant les services et en stimulant la collaboration entre les différents membres de la société, et aussi en allant chercher des partenaires clés à l'extérieur afin d'aller plus loin dans certaines investigations", tel est le message envoyé par Laurent Taalbi, directeur d'Hendrix Genetics France, le 21 avril dernier à Angers en introduction de l'assemblée générale des interpofessions "Volailles de chair" organisée sur le thème de l'innovation.[caption id="attachment_365" align="alignleft" width="225"]Gilles Le Pottier, alors animateur du Cidef-CIPC-Cicar. Gilles Le Pottier, alors animateur du Cidef-CIPC-Cicar.[/caption]"Comment construire une économie innovante et aller au-delà de l'optimisation de chacun des maillons ?", voilà la question posée par Gilles Le Pottier, animateur du Cidef-CIPC-Cicar, en amont des présentations et des discussions qui ont marqué la matinée.La RHD, un secteur stratégiqueUne question cruciale dans le contexte actuel où la France fait face à un niveau élevé d'importations sur le marché de la viande de volailles, particulièrement sur le secteur de la restauration hors domicile (RHD). Celui-ci se décompose en deux grands circuits historiques-la restauration commerciale et la restauration collective- avec à côté, l'émergence ces dernières années de nouveaux circuits (boulangeries-pâtisseries, parcs d’attraction, bouchers-charcutiers-traiteurs, e-commerce, distribution automatique).La restauration collective et ses trois milliards de repas servis chaque année dans quelque 73 000 restaurants, représente un enjeu alimentaire d'envergure, d'autant plus que près de 80 % des volailles qui y sont consommées, sont aujourd'hui importées. Si l’Etat a pris toute la mesure de l’enjeu en fixant un objectif de 40% de produits de proximité dans la restauration collective à l’horizon 2017, reste à la filière avicole française à s’organiser pour répondre aux besoins de ces marchés, et faire la différence par rapport aux importations. Et c'est dans cette logique que les interprofessions Cidef et le CIPC ont décidé de faire appel au Centre Culinaire Contemporain afin d’associer utilisateurs et acteurs de la filière à une démarche originale et participative : décrypter les usages en Food Service afin de repérer et définir collectivement des opportunités majeures pour les filières dinde et poulet.Une démarche stratégique car si les Français opèrent de nombreux arbitrages budgétaires pour gérer au mieux leurs consommations, ils sont loin de bouder la restauration. La transformation des modes de vie (urbanisation, tertiarisation, éloignement de l’emploi et augmentation des temps de transport, société des loisirs…) s’accompagne en effet d’une augmentation régulière du nombre de repas pris hors domicile. Et les perspectives du secteur sont optimistes, même si ce dernier doit continuellement repenser son modèle.Les cinq phases de l’étudeLes protagonistes engagées dans cette étude se sont ainsi attachés à :1.explorer les usages de la viande de dinde et de poulet en analysant l’itinéraire des pratiques aux différentes étapes : approvisionnement, stockage, préparation, présentation, consommation,2.décrypter les attentes des professionnels de la restauration, des industries agroalimentaires (IAA),3.échanger sur les perspectives de développement,4.identifier l’écosystème favorable tant pour le collectif que pour chaque acteur de la filière.Cette étude s’est réalisée en cinq phases :• une phase d’entretiens auprès des professionnels de la restauration collective, commerciale, gastronomique, snacking, traiteur,• des entretiens en face à face chez les IAA et distributeurs,• des interviews d’experts ciblés afin de récolter leur vision de l’innovation, du système d’acteurs en place, les enjeux et rapports de force éventuels, les problématiques sociétales et les réponses à apporter,• un décryptage des innovations et tendances sur le marché de la volaille visant à constituer un répertoire d’idées,• la réalisation d’un diagnostic croisé avec un regard interdisciplinaire.Attachement, expertise et partageFreddy Thiburce, directeur général du Centre culinaire Contemporain, et son collègue Fabrice Clochard, directeur de recherche, ont ainsi présenté le 21 avril les principaux enseignements et conclusions de l'étude menée en partenariat avec la Commission RHD constituée d’un pool d’acteurs des filières Dinde & Poulet. Parmi les questions soulevées par les professionnels : Comment contrer le niveau élevé d’importation de volaille ? La France doit-elle être la variable d’ajustement des marchés européens voisins ? Les systèmes d’élevage et de production sont-ils adaptés à la demande du marché ? Doit-on aller vers la standardisation de l’offre et l’hyper-rationalisation des outils de production, à l’image des allemands ? La RHD doit-elle rester un marché de dégagement ? La filière connaît-elle les usages et attentes des professionnels de la restauration ? La filière propose-t-elle le bon mix-produit ? Quels leviers sont activés pour valoriser le muscle ? La filière prend-elle ses responsabilités en matière de création de valeur ?[caption id="attachment_1197" align="alignleft" width="300"]Freddy Thiburce, directeur général du Centre Culinaire Contemporain, et son collègue Fabrice Clochard, directeur de recherche. Freddy Thiburce, directeur général du Centre Culinaire Contemporain, et son collègue Fabrice Clochard, directeur de recherche.[/caption]"Il est possible de créer du renouveau et de la valeur dans la filière volaille française en agissant à trois niveaux", a annoncé Freddy Thiburce, avant de les énumérer :• travailler l'attachement affectif associé à la dinde et au poulet,• développer l’expertise qui exploite les dimensions rationnelles associées au produit et à ses usages. Elle structure le savoir et le savoir-faire culinaire.• créer du partage en intégrant la dimension sociale dans l’acte de produire, transformer et consommer le produit.A chacun de ces trois niveaux, il est possible d'actionner différents leviers de valorisation de la volaille en Food Service, tant d’un point de vue individuel que collectif. Ainsi par exemple, pour créer de l'attachement affectif, il est possible de jouer sur la dimension projective (imaginaire, symbolique), la dimension sensorielle (texture, odeur), la dimension esthétique (présentation, assemblage, gestuelle) ou expérientielle (création de scénarios culinaires).Adopter une approche différenciéeToutefois, "il faut appréhender chaque univers de manière différenciée et segmenter l’offre afin de gagner en valeur", insiste Freddy Thiburce. Restauration commerciale indépendante premium, chaîne de restauration commerciale/snacking, restauration collective (hospitalière, scolaire ou entreprises), le secteur de la RHD est en effet multiple et doit trouver des réponses adaptées à ses contraintes, besoins et attentes."L’enjeu pour les filières dinde et poulet en RHD est d’activer le double ressort de la transparence de l’origine et du potentiel de culinarité pour affirmer l’identité 'Volaille Française' ", affirme-t-il. La transparence de l’origine réassure le consommateur sur les atouts de la filière en termes de bien-être animal, de naturalité, de nutrition (produit sain, tracé, sécurisé) et valorise l’engagement des éleveurs responsables et garants de la santé publique et de l’environnement. Le potentiel de culinarité intègre de son côté différents aspects : la référence à la gastronomie française, la tradition bouchère volaillère, mais aussi le renouveau et la "french cuisine touch", l’inspiration et la créativité des Chefs et futurs Chefs.10 actions à court termeFreddy Thiburce a ensuite proposé aux professionnels de la filière une liste de 10 actions à mettre en œuvre à court terme, en lien avec la vision stratégique et le travail de segmentation proposé. A savoir :• valoriser tous les contenus existants face à la multitude des demandes (recours à la narration culinaire et aux ateliers dédiés),• constituer un référentiel culinaire,• démontrer le rôle incontournable des volailles en adaptant l’argumentaire en fonction des utilisateurs,• disposer de répertoires de bonnes pratiques (recommandations permettant aux cuisiniers de se renouveler et d’ expérimenter),• proposer des supports culinaires adaptés aux différents secteurs stimulant la créativité,• identifier les leaders et investir les réseaux professionnels,• incarner l’école culinaire "Volaille française",• proposer aux prescripteurs les contenus et supports commerciaux pour diffusion ciblée,• rédiger un livre blanc."Ces recommandations, ici centrées sur les usages Dinde & Poulet en Food Service, peuvent être élargies à toute la catégorie Volaille Française", précise-t-il. Une stratégique pertinente serait ainsi de renforcer l’offre en considérant conjointement la dinde, le poulet, le canard, la pintade, etc.Le travail collectif mené dans le cadre de cette étude a également permis de souligner la nécessité pour la filière avicole de proposer une offre segmentée, différenciée et bien comprise ; d’imaginer une chaîne de valeur globale et équilibrée ; de mettre en avant la transparence et l’humain pour renforcer la confiance ; puis de concilier savoir-faire traditionnel, compétitivité et innovation."Au final, affirmer l’identité 'volaille française' par la transparence et le potentiel de culinarité, c’est faciliter le jeu de chaque acteur, que ce soit à titre individuel pour les entreprises, ou collectif entre les différentes interprofessions, chacun préservant sa capacité d’initiative dans un cadre cohérent et global. C’est aussi renforcer la complémentarité des intérêts de tous au bénéfice de la Volaille française, de ses acteurs et de ses différents utilisateurs et consommateurs", a-t-il conclu.Un rapport en cours de finalisationUn rapport transversal est en cours de finalisation. Ce dernier illustre les résultats de l’étude des usages en RHD et les axes d’avenir à privilégier. Quatre leviers de valorisation ont été clairement identifiés :• concilier savoir-faire et filière innovante,• imaginer une chaîne de valeurs globales et équilibrées,• mettre en avant la transparence et l’humain pour renforcer la confiance,• proposer une offre segmentée, différenciée et bien comprise.La commission RHD aura la charge de proposer un plan d’actions au regard des conclusions de cette étude pour les années 2016 et 2017.[gallery td_select_gallery_slide="slide" ids="359,365,340,339,338,369,361,364"]
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